Andrographis et cancer

Quand la phytothérapie augmente les chances de survie post traitements

Pour une fois que l’on peut parler d’une synergie phytothérapie/cancérologie avec des preuves solides et vérifiables ! L’étude sur andrographis et cancer dont je vais vous parler est assez impressionnante en termes de résultats, et tellement porteuse d’espoir pour l’avenir ! Comme vous le savez, je défends ardemment une approche complémentaire, où les traitements allopathiques et les solutions naturelles se conjuguent pour alléger le quotidien des patients engagés dans des parcours de soins souvent éprouvants face au cancer.

Car il n’est pas normal de tenter de survivre à ses chimiothérapies sans pouvoir amoindrir ses nausées et sa fatigue. Il n’est pas normal de subir les douleurs ostéo-articulaires, les bouffées de chaleur et les suées nocturnes de l’hormonothérapie, sans pouvoir travailler avec les plantes et la micronutrition à côté pour rendre le quotidien vivable. Quel est l’intérêt de simplement « survivre » lorsque l’on a perdu toute qualité de vie, toute vitalité, toute envie de s’alimenter ? La dénutrition pendant les traitements est également un fléau.  

J’ai vu la vie quitter mes proches, insensiblement, au rythme cruel des jours, des semaines, des mois, rongés par les effets secondaires des traitements. Jusqu’à ce que chaque heure soit elle-même une épreuve. Et je n’ai pas peur de le dire car je l’ai vécu, et tout cela peut être soutenu par des approches naturelles. Il faut cesser de taire les bénéfices que peuvent apporter les plantes pendant les traitements. C’est ce que cet article va vous démontrer. Grâce à une plante : l’Andrographis. Elle n’est pas miraculeuse, d’autres solutions phytothérapeutiques sont également très efficaces en soins de support. Mais ici nous avons une étude qui la concerne et qui pointe du doigts ses propriétés spécifiques en cas de cancer.

L’étude en question : Andrographis et cancer

Voici le titre de l’étude, pas glamour pour un sou, et pourtant une lueur d’espoir dans les soins palliatifs du cancer de l’œsophage : « L’effet de l’extrait aqueux d’Andrographis paniculata sur la prise en charge palliative du carcinome épidermoïde métastatique de l’œsophage — Un essai clinique de phase II.”

Un essai de phase II[1] a donc été mené auprès de patients atteints d’un CEO métastatique ou localement avancé, pour lesquels la chirurgie n’était plus envisageable. Tous avaient déjà traversé, sans succès durable, les protocoles de chimiothérapie ou de radiochimiothérapie à visée palliative.

Pendant quatre mois, ces patients ont reçu une forme concentrée de la plante – des granulés d’Andrographis paniculata  – intégrée à leur prise en charge[2]. Leur état de santé, leur qualité de vie et l’évolution de leur tumeur ont été régulièrement évalués, notamment par des examens d’imagerie (TEP/CT) réalisés à trois et six mois.

Fait remarquable : les chercheurs ont également analysé la composition du microbiote intestinal, cet écosystème intime aujourd’hui reconnu pour jouer un rôle majeur dans la régulation de l’immunité et l’évolution des maladies chroniques.

Sur les 30 participants, 10 ont pu suivre le protocole jusqu’à son terme[3]. Ces patients ont vu leur espérance de vie significativement prolongée, tout en préservant leur qualité de vie, comparativement à ceux n’ayant pu achever le traitement.

Mais un autre phénomène, plus subtil, a été observé : la flore intestinale de ces patients traités par andrographis a commencé à se modifier, évoluant peu à peu vers une composition plus proche de celle des individus en bonne santé. Une donnée qui ouvre la voie à de nouvelles hypothèses sur l’interaction entre plantes médicinales, immunité, cancer… et intestins. Je vous renvoie d’ailleurs à mon article sur Probiotiques et cancer si vous souhaitez creuser le sujet.

[1] À noter : un essai clinique de phase II vise à évaluer l’efficacité d’un traitement chez des patients, après avoir vérifié son innocuité en phase I. Il s’agit d’une étape cruciale pour juger de son potentiel thérapeutique avant d’envisager une validation à grande échelle.

[2] Les sujets éligibles se sont vu prescrire quotidiennement des granulés concentrés d’andrographis pendant quatre mois par un praticien de médecine chinoise agréé. La posologie était de 130 mg/kg de poids corporel. Les granulés étaient conditionnés en sachets et dissous dans de l’eau chaude avant d’être pris par voie orale après le déjeuner. Toutes les herbes chinoises autres que l’andrographis, ainsi que les autres traitements de médecine chinoise ou la chimiothérapie, ont été interdits pendant les 4 premiers mois de la période de traitement.

[3] Au total, 34 patients ont été recrutés pour l’étude avec consentement éclairé. 4 patients n’ont pas reçu le traitement par andrographis après le recrutement en raison d’une détérioration soudaine de l’état de la maladie. 10 patients ont terminé la période de traitement par andrographis, tandis que 20 patients ont reçu un traitement par andrographis partiel. 13 d’entre eux sont décédés pendant le traitement en raison de la progression de la maladie, tandis que 7 patients se sont retirés de l’essai après avoir reçu un traitement partiel par andrographis (4 patients sont passés à un autre traitement comme la chimiothérapie ou un autre médicament de médecine chinoise ; 2 patients ont ressenti une gêne ; 1 patient sous sonde d’alimentation). Tous les patients qui ont été recrutés pour cette étude étaient ceux qui avaient déjà terminé une chimioradiothérapie palliative, une chimiothérapie ou une radiothérapie ou n’étaient pas aptes à ces traitements avant le recrutement.

Andrographis et cancer

Une plante, une promesse: l’Andrographis

Ce travail représente bien plus qu’une étude supplémentaire dans la littérature scientifique : c’est, à ce jour, le premier essai clinique documenté de l’extrait aqueux d’Andrographis paniculata chez des patients atteints de cancer de l’œsophage. Peu connue dans notre pharmacopée française, l’Andrographis trouve ses lettres de noblesse outre-Atlantique dans des sources anglophones et quebequoises.

Originaire de l’Inde et du Sri Lanka, naturalisée aujourd’hui dans l’ensemble de l’Asie du Sud-Est, l’Andrographis appartient à la famille des Acanthacées. Ce sont principalement ses feuilles, concentrées en substances actives (andrographolides, flavonoïdes…), qui sont utilisées à des fins médicinales.

Elle agit comme un stimulant du système immunitaire, un antiviral, un anthelminthique, un protecteur hépatique et un anti-inflammatoire (2). Certaines études lui attribuent même des propriétés anticancéreuses (4). Bref, une plante aux multiples casquettes thérapeutiques, qui mérite toute notre attention en cette ère de fragilités immunitaires chroniques.

Comme toutes les grandes plantes amères, l’Andrographis (un de ses noms vernaculaires est “Roi des amers”) active la sécrétion biliaire et la digestion. Elle est cholagogue (favorise l’évacuation de la bile) et cholérétique (stimule sa production). Cette double action la rend précieuse pour soulager le foie surmené, soutenir une détoxification naturelle de l’organisme et améliorer les digestions lentes ou lourdes.

Mais au-delà du système digestif, c’est son action antivirale et antiparasitaire qui attire aujourd’hui de plus en plus l’attention des chercheurs. Utilisée traditionnellement pour traiter des infections telles que la grippe ou l’hépatite virale, elle se révèle également efficace contre certains parasites intestinaux (Giardia, Blastocystis hominis, Dientamoeba fragilis) (2).

L’Andrographis est également un diaphorétique froid, c’est-à-dire qu’elle favorise la transpiration tout en rafraîchissant le corps. Elle est donc idéale pour accompagner des infections fébriles, notamment respiratoires, urinaires ou intestinales, tout en évitant les poussées inflammatoires excessives. Elle est donc particulièrement indiquée dans les états inflammatoires chauds, les infections avec fièvre type malaria, ou encore les troubles du foie type hépatites (3) ou liés à un excès de chaleur (colères, irritations digestives, etc.).

En stimulant la phagocytose (2), elle renforce la capacité du système immunitaire à reconnaître et éliminer les agents pathogènes. Son efficacité repose donc sur une alliance subtile : d’un côté, elle freine les excès inflammatoires ; de l’autre, elle dope la vigilance immunitaire.

Et c’est notamment pour le soutien immunitaire qu’elle est citée spécifiquement comme traitement adjuvant utile en cas de cancer par Mills & Bone (5). Les auteurs ayant parcouru un grand nombre d’études nous détaillent les actions suivantes au sujet de l’Andrographis :

Activité antitumorale:

◦ Inhibition de la prolifération de plus de 30 lignées de cellules tumorales in vitro pour divers cancers (sein, SNC, côlon, poumon, mélanome, ovaire, prostate, rénal et leucémie).

◦ Induction de l’arrêt du cycle cellulaire et de l’apoptose dans les cellules cancéreuses.

◦ Amélioration de l’activité cytotoxique des lymphocytes contre les cellules cancéreuses.

◦ Inhibition de la croissance tumorale in vivo (mélanome B16 et tumeurs du côlon HT-29 chez les souris).

◦ Sensibilisation des cellules cancéreuses (colorectales, cervicales, hépatiques) à la doxorubicine.

◦ Inhibition de l’angiogenèse (réduction des cytokines pro-inflammatoires et du VEGF, élévation des facteurs antiangiogéniques).

◦ Réduction substantielle de la croissance tumorale et prolongation du temps de survie chez les souris.

◦ Augmentation de l’activité des lymphocytes T cytotoxiques et des cellules Natural Killer.

Concernant son activité hépatoprotectrice, j’ai pu extraire ces informations de leur ouvrage:

◦ Protection contre la toxicité hépatique chimiquement induite, supérieure à la silymarine dans certaines études in vitro.

◦ Normalisation des paramètres biochimiques hépatiques et amélioration des changements histopathologiques dans le foie.

◦ Réduction des paramètres de dommages hépatiques et du développement des tumeurs hépatiques induites par le carcinogène.

◦ Induction des enzymes hépatiques de métabolisation des médicaments, ce qui peut détoxifier les hépatotoxines.

Précautions d’usage : Attention si allergie aux acanthacées (des auteurs comme Stephen Buhner notent des cas d’urticaires assez sérieux), il y a également un risque de nausées et troubles digestifs en raison de l’amertume. Certaines études (animales) suggèrent que l’Andrographis pourrait interférer avec la régulation du glucose, ce qui implique une prudence chez les personnes diabétiques sous traitement. Elle est également contre-indiquée en cas de grossesse, avec des effets abortifs documentés, et déconseillée pour les couples cherchant à concevoir.

Modes d’utilisation et transformation de l’Andrographis en herboristerie traditionnelle:

  • Teinture (feuilles sèches : 1:5 – alcool 40 %) : 1 à 4 ml, 3 à 4 fois par jour.
  • Alcoolature (feuilles fraiches : 1:2 – alcool 70%): 1 à 4 ml, 3-4 fois par jour.
  • Extrait glycériné : 5 à 10 ml, 3 à 4 fois par jour. Feuilles sèches (1:8, 60% de glycérine)
  • Poudre en capsules : 500 à 1000 mg, 3 fois par jour (la poudre seule est imbuvable car trop amère).

Remettre la vie au cœur des traitements

Vous l’aurez compris, mon propos n’est pas de dire que l’Andrographis est une potion magique. L’Andrographis est un pretexte. L’analyse de cet article est un pretexte pour défendre ce qui me tient le plus à cœur depuis la perte de deux êtres chers des suites de la maladie : les plantes méritent qu’on leur fasse une place dans l’accompagnement global des patients atteints de cancer.

Pourquoi des solutions naturelles iraient forcément s’opposer à la médecine conventionnelle ?

Nous ne parlons pas ici d’alternatives, mais de compléments, de soutien, d’humanité rendue à celles et ceux que l’on ne sait plus très bien comment accompagner. Les effets secondaires ne sont pas une fatalité. La perte de qualité de vie non plus. Il est temps que les soignants, les chercheurs et les praticiens de santé naturelle œuvrent ensemble pour offrir des parcours de soin plus justes, plus doux, plus efficaces.

Cette étude sur l’Andrographis ouvre une brèche, un espoir, un espace de dialogue entre deux mondes encore trop cloisonnés. À nous de l’élargir, de continuer à documenter, à explorer, à défendre ce qui soulage et soutient. Car soigner, ce n’est pas seulement combattre une maladie. C’est aussi – et peut-être surtout – préserver la vie qui reste.

Pour rappel : je ne suis ni médecin, ni pharmacien. Un conseil en herboristerie ou naturopathie ne remplacera jamais un avis médical. Ne suivez jamais les conseils d’un praticien vous recommandant d’arrêter vos traitements.

Vous pouvez télécharger mon PDF gratuit sur l’accompagnement en cancérologie ici.

Andrographis et cancer

Références

(1) « L’effet de l’extrait aqueux d’Andrographis paniculata sur la prise en charge palliative du carcinome épidermoïde métastatique de l’œsophage — Un essai clinique de phase II.”: https://doi.org/10.1002/ptr.7815

(2) FloraMedicina, Materia Medica, « Andrographis paniculata », 2021.

(3) https://www.wikiphyto.org/wiki/Andrographis

(4) Kumar RA, Sridevi K, Kumar NV, Nanduri S, Rajagopal S. Anticancer and immunostimulatory compounds from Andrographis paniculata. J Ethnopharmacol. 2004 Jun;92(2-3):291-5. doi: 10.1016/j.jep.2004.03.004. PMID: 15138014.

(5) Kerry Bone and Simon Mills, Principles and practice of phytotherapy – Modern herbal medicine, « Andrographis paniculata », Churchill Livingstone, Second edition, pp360-372, 2013. https://doi.org/10.1016/C2009-0-48725-7

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