Le Gattilier : SPM & Endométriose

Parlons du gattilier comme plante de la femme. Mais d’abord, ma petite histoire.

Les jours qui précèdent l’arrivée de mes règles, j’ai l’impression d’être bipolaire et dépressive.  Enfin, ce n’est pas qu’une impression : mon humeur fluctue 15 fois dans la journée, et mon moral est au plus bas. Perte de motivation pour tout. Envie d’être seule. Nuits catastrophiques. C’est une réelle souffrance quotidienne, qui se répète inlassablement tous les mois. Sans parler des inconforts au niveau de la sphère utérine : picotements dans les ovaires, tiraillements, « décharges électriques », sensation d’avoir des « masses » qui se baladent dans l’utérus. Au niveau de la sphère digestive : diarrhées. Et pour couronner le tout : je gonfle comme Bidendum Michelin (merci la rétention d’eau), + 2kg en moyenne en période de règles.

Et puis le jour où mes règles arrivent, c’est une sorte de délivrance, mais qui me met complètement à plat. La tension est montée crescendo pendant 3 ou 4j, jusqu’au point culminant où je ne supporte plus rien. Les douleurs s’intensifient lorsque les saignements se déclenchent, souvent ça me « couche » littéralement pour la journée (au sens propre : je suis pliée en 2 en PLS dans mon lit). Mais je ressens une sorte de libération d’un étau dans lequel j’étais contrainte. Quelque chose qui me tenait, qui me contenait, qui m’oppressait, et qui s’en va d’un coup. Une sorte de chappe de plomb de disparait. Et qui me laisse sans énergie. Vidée. Une fatigue immense. Au bout du rouleau.

Certaines femmes ont en prime des seins gonflées et douloureux (mastalgie), des bouffées de chaleur, de la constipation, maux de tête, acné, pulsions sucrées…. Tous ces symptômes, c’est ce que l’on nomme le « SPM » dans le jargon : Syndrome Pré-Menstruel. Il est lié à des fluctuations hormonales et nous contraignent, nous les femmes, à devoir endurer ces épisodes chaque mois. Et ce fameux SPM aggrave les problèmes chroniques de type endométriose, SOPK, fibromes, etc.

Et j’irai même plus loin, c’est-à-dire que pour moi il s’agit aussi d’un Syndrome POST-Menstruel : les 2 ou 3j qui suivent mes règles, c’est le même combat. Une instabilité émotionnelle exacerbée et des envies de pleurer pour rien. Une grosse remise en question de ma santé mentale en somme…

Donc si je fais le calcul, sur les 30j que contient 1 mois, j’ai une grosse dizaine de jours de symptômes. 1/3 de mon mois. Je suis réglée depuis mes 13 ans. J’ai 36 ans. Cela fait donc 23 ans que j’ai mes règles. 10j x 12 mois = 120j x 23 ans = 2760j

2760j / par 365j = 7,6 années de SPM et de souffrance.

A l’origine des déséquilibres hormonaux

Alors quelques mots sur les origines du SPM avant d’entrer dans le vif du sujet avec le Gattilier, car il faut poser les bases pour comprendre l’action subtile des plantes.

Pour comprendre son origine, il faut regarder de plus près ce qui se passe dans le corps pendant le cycle menstruel, en particulier après l’ovulation, qui est la phase qui précède les menstruations.

Le cycle menstruel se divise en deux parties principales : avant et après l’ovulation. Après l’ovulation, le corps commence à produire de la progestérone, une hormone qui aide à préparer l’utérus pour une éventuelle grossesse. Cette phase s’appelle la phase lutéale. En même temps, les œstrogènes, une autre hormone, continuent à être produits mais en moindre quantité.

Le SPM survient lorsque la production de progestérone n’est pas suffisante pour maintenir cette phase de manière optimale. En d’autres termes, il y a un déséquilibre entre les niveaux de progestérone et d’œstrogènes. Plus spécifiquement, si la progestérone chute trop rapidement avant les règles, le corps ne bénéficie plus suffisamment de son influence stabilisatrice. Cette chute brutale de la progestérone est ce qui déclenche les symptômes du SPM.

Si je résume, la cause principale admise par la communauté scientifique est que le SPM se produit principalement parce que, dans les jours qui précèdent les règles, le corps d’une femme perd trop vite la progestérone, l’hormone qui devrait normalement maintenir l’équilibre pendant cette phase du cycle.

J’ai dit « cause principale », car évidemment sur un SPM, on a un causalisme multifactoriel. Je tiens déjà à préciser que le SPM peut être exacerbé par d’autres facteurs sous-jacents, comme un dysfonctionnement de la thyroïde (déformation professionnelle, désolée je ramène tout à la thyroïde). La thyroïde joue un rôle crucial dans la régulation du métabolisme et des hormones. Si cette glande fonctionne de manière insuffisante (hypothyroïdie), cela peut aggraver les symptômes du SPM. Les signes d’une hypothyroïdie incluent une fatigue chronique, une prise de poids inexpliquée, et une sensation de froid constant. Il est donc important de consulter un médecin et de réaliser un bilan sanguin pour évaluer la fonction thyroïdienne, surtout si ces symptômes sont présents.

Par ailleurs, le déséquilibre hormonal, en particulier un excès d’œstrogènes, peut également aggraver l’endométriose (je ramène également tout à l’endo, sorry). Lorsque les œstrogènes dominent la progestérone, cela peut intensifier les crises d’endométriose, rendant les douleurs plus sévères et les symptômes plus difficiles à gérer. Du coup, surveiller et équilibrer les niveaux hormonaux est essentiel pour atténuer les symptômes à la fois du SPM et de l’endométriose.

Et pour terminer ce causalisme : tout cela est également probablement aggravé par une faiblesse de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien, un système essentiel qui est fortement sollicité en cas de stress chronique ou d’inflammation persistante, des conditions courantes de nos jours. Il est important de se rappeler que les glandes surrénales produisent également une certaine quantité d’hormones sexuelles, ce qui peut influencer l’équilibre hormonal général lorsqu’elles sont dysfonctionnelles.

Gattilier Vitex agnus castus

Le Gattilier (Vitex agnus castus)

Dans tous mes essais de plantes, je n’avais encore jamais testé le Gattilier (ne me demandez pas pourquoi, ce sont les cordonniers les plus mal chaussés…). Et ma mère m’a commandé des gélules de Gattilier chez FolckOfficinalis : Gattilier 〜 Confort féminin – Endométriose – Fibromes – Douleurs (folkofficinalis.com) (François de son prénom, installé en Hongrie avec sa petite famille, et avec qui j’ai sympathisé depuis quelques années via les réseaux sociaux. Je commande régulièrement toutes sortes de produits naturels faits mains et artisanalement, ce sont des petites pépites ! – Oui j’ai désormais décidé de vous parler des petits producteurs de PAM chez qui j’achète mes produits, car il faut les soutenir !).

Du coup j’ai pensé vous faire un article sur les subtilités de cette verbénacée. Mais d’abord vous raconter des petites anecdotes autour de cette plante et de ses surnoms ! Car on l’appelle « poivre aux moines », « agneau chaste » ou encore « arbre à poivre ». Il y a 2000 ans Dioscoride cite la plante comme anaphrodisiaque, dans l’utilisation de boissons calmantes de la libido. Ensuite au Moyen-âge, elle est cultivée dans les cloitres médiévaux pour aider les moines à mieux supporter leur abstinence. Ces derniers en tressaient des ceintures, d’où son appellation populaire de « poivre aux moines ». Ensuite en 1943, une firme allemande élabore un extrait de baies de gattilier standardisé en agnuside (l’un des principes actifs de la plante, un glycoside iridoïde) et dans les années 1950 l’extrait est adopté pour le traitement de la mastalgie, dont nous parlions plus haut (1).

Plante puissante vous l’aurez compris, à ne pas mettre dans toutes les mains. Petite revue de littérature si vous le voulez bien :

Le docteur Jean Valnet nous dit que la plante est antispasmodique, équilibrant du système vago-sympathique et un sédatif général et génital (1). Il ne l’utilisait pas principalement à l’époque pour les SPM, mais plutôt dans les cas de palpitations, vertiges, spasmes intestinaux et insomnies. Sous forme d’infusion ou d’extraits fluides.

Marie-Antoinette Mulot ne donne guère d’indications, nous informant que des travaux sont en cours concernant la plante. Elle précise néanmoins les usages précédents « Le gattilier est une plante dont on ne parle guère, elle est utilisée comme antispasmodique dans les angoisses, l’insomnie nerveuse, dans les troubles du transit intestinal, afin de régulariser les contractions péristaltiques quand celles-ci sont spasmodiques et en cas de douleurs pelviennes (règles douloureuses) » (2). Elle la conseille également sous forme infusée.

« Un remède essentiellement féminin » (3). Voilà le docteur Gilles Corjon donne le ton. Le Gattilier est un régulateur hormonal à action lutéotrope[1] et antispasmodique. Il préconise son utilisation en cas d’insuffisance du corps jaune, SPM avec douleurs mammaires, règles irrégulières ou insuffisantes, cycles anovulatoires, nervosité, irritabilité, troubles de l’humeur, état dépressif, troubles du sommeil, et globalement tous les troubles de la ménopause et de l’infertilité. Il recommande un usage en EPS (Gélules d’extraits standardisés), teinture mère ou extrait fluide.

Les ouvrages de Claudine Luu et Annie Fournier (1) et du docteur Eric Lorrain (5) nous permettent d’aller plus loin dans la compréhension de l’action de la plante. Certains principes actifs majeurs, comme les labdane-diterpènes, ont une action agoniste dopaminergique centrale et périphérique, via l’inhibition de sécrétion de prolactine. La plante a donc une action régulatrice hormonale antiœstrogène et antiandrogène, en favorisant la remontée de progestérone en milieu de cycle et en normalisant la LH, FHS et GnRH. Elle s’utilise donc en cas de SPM dans un contexte d’insuffisance lutéale, hyperœstrogènie relative et hyperprolactinémie. Je vous renvoie vraiment à l’ouvrage du docteur Lorrain pour avoir toutes les informations et études scientifiques en référence !

Donc clairement on va l’utiliser dans le cadre du SPM pour :

  • Douleurs mammaires : mastalgie et mastose
  • Règles douloureuses
  • Déficience du corps jaune (cliniquement la diminution de la sécrétion de prolactine permet un allongement de la durée de vie du corps jaune et donc une régulation de la durée des cycles)
  • Troubles menstruels : cycles irréguliers ou aménorrhées (action emménagogue)
  • Saignements utérins (corrige les anomalies du cycle, en relation avec une insuffisance lutéale et une hyperprolactinémie latente)
  • Hyperœstrogènie : endométriose, SOPK, mastose fibokystique, fibrome utérin, hyperplasie de la muqueuse utérine, kystes fonctionnels ovariens,
  • Troubles mineurs du sommeil
  • Angoisses et dépressions prémenstruelles
  • Infertilité (homme et femme)
  • Migraines et céphalées
  • Rétention hydrosodée
  • Chez l’homme : gynécomastie, HBP.

Le Gattilier s’intègre dans une stratégie générale d’amélioration du bien-être de la personne, avec d’autres conseils phyto, une alimentation adaptée, de l’exercice physique etc … Donc petit warning : il va falloir soutenir le cycle dans son ensemble, et ne pas se focaliser uniquement sur la phase lutéale !

J’ai commencé ma cure de Gattilier depuis 1 mois. J’ai eu mes règles il y a 5j. Je ne sais pas encore si ce sont les effets (car je prends en parallèle des champignons médicinaux, du magnésium, un complexe multivitaminique et des tisanes selon mon humeur (fluctuante ^^)), mais elles sont arrivées sans douleurs. Par contre 2j avant j’ai eu ma baisse de moral terrible qui m’a tout fait remettre en question. Et mes douleurs invalidantes sont arrivées à J+2. Par contre je n’avais pas connu cette arrivée des règles sans AUCUNE douleur depuis des lustres. C’était assez incroyable d’être enfin tranquille. Je continue ma cure, je vous ferai un autre article avec mon feedback dans quelques mois après une cure plus longue….

Contre-indications de la plante : femmes enceintes et allaitantes, protocole FIV (action stimulante sur l’utérus), antécédents de cancers hormono-dépendants. Interactions médicamenteuses théoriques avec les médicaments antagonistes de la dopamine : antiémétique, antiparkinsonien, neuroleptique.

Encore une fois, avant de vous lancer dans la consommation de plantes dans votre quotidien, veillez à consulter des ouvrages et des sites de référence afin d’être au clair sur les contre-indications de chaque plante en fonction de votre condition

Pour rappel : je ne suis ni médecin, ni pharmacien. Un conseil en phytothérapie ne remplace pas un avis médical. Ces informations sont données à titre informatif.

[1] L’action lutéotrope se réfère à l’influence d’une substance ou d’un processus sur le corps jaune (également appelé corpus luteum), une structure temporaire formée dans les ovaires après l’ovulation. Le corps jaune se développe à partir du follicule ovarien qui a libéré un ovule, et il joue un rôle crucial dans la production de certaines hormones, principalement la progestérone, qui est essentielle pour la régulation du cycle menstruel et la préparation de l’utérus pour une éventuelle grossesse.

Une action lutéotrope désigne donc la capacité d’une substance à soutenir ou à stimuler la fonction du corps jaune. Cela inclut généralement la stimulation de la production de progestérone, ce qui peut aider à maintenir la phase lutéale du cycle menstruel, réduire les symptômes prémenstruels, et stabiliser les niveaux hormonaux.

Pour lire plus d’articles sur l’herboristerie, la naturopathie et la santé holistique, merci de vous rendre ici.

Vous pouvez également télécharger mon livret gratuit spécial douleurs d’endométriose ici 

Gattilier Vitex agnus castus

Références

(1) Claudine LUU et Annie Fournier, 300 plantes médicinales de France et d’ailleurs. Identification, principes actifs, modes d’utilisation…, Editions Terre Vivante, 2021.

(2) Jean VALNET (Dr), La phytothérapie. Se soigner par les plantes, Le Livre de Poche, 2017.

(3) Marie-Antoinette MULOT, Secrets d’une herboriste. La Bible des Plantes, Editions Dauphin, 2021.

(4) Gilles CORJON (Dr), Se soigner par les plantes, Editions Gisserot, 2018.

(5) Eric LORRAIN (Dr), Grand manuel de phytothérapie, Editions Dunod, 2019.